Les derniers jours des Romanov – Luc Mary
Juin 1918. « L’ange approche », écrit dans son journal intime Alexandra, dernière impératrice de Russie, après 15 mois de captivité. Cet ange, un envoyé de Lénine, est un exterminateur dont l’épée s’abat un mois plus tard sur la tsarine, son époux Nicolas II, leurs quatre filles et l’unique héritier du trône, le tsarévich Alexis, un adolescent de 13 ans. La révolution bolchevique vient de tomber le masque.
Y a-t-il des survivants ? Une semaine seulement après la mise à mort du 17 juillet 1918, les armées blanches ne trouvent à Ekaterinbourg que cendres et destruction. Quant au lieu présumé de l’inhumation, une mine en forêt, on n’y découvre aucun corps. Démembrés, dispersés, brûlés et enterrés, les restes des derniers Romanov demeureront introuvables jusqu’à la chute de l’URSS, donnant cours aux plus folles rumeurs. Il y aura presque autant de grandes-duchesses qu’il y eut de Louis XVII… mais le 22 janvier 2008, l’ADN a parlé. La sinistre forêt de Kopiatki vient de livrer son dernier mystère…
C’est le récit de cette enquête scientifique et historique que livre Luc Mary, mais aussi la chronique d’un régicide annoncé, celui du tsar, faible et influençable, promis à la chute dès le sacre et dont la Révolution aura fait un martyr, puis un saint dont nul n’imaginait que les reliques seraient un jour vénérées sous les fenêtres de son ancien palais.
Un jour, alors que j’étais au lycée, en train de préparer mon bac, notre prof d’histoire a abordé la révolution russe. Une mention au passage de l’assassinat du dernier tsar m’a mis la puce à l’oreille. Il faut dire que déjà à cette époque, j’étais attirée par tout ce qui touchait à la Russie et à la royauté, alors les tsars de Russie entraient tout à fait dans cette catégorie. Et les mystères de l’histoire m’ont toujours fascinée, surtout lorsqu’ils touchent aux régents, alors bon… un peu plus tard, mon père est revenu à la maison un jour avec un ouvrage qui parlait (justement) des mystères de l’histoire du monde et la disparition des Romanov y faisait l’objet d’un chapitre. Je l’ai et relu plusieurs fois, ce chapitre. Depuis, cette fascination pour ce mystère ne m’a pas quitté. J’ai lu quelques ouvrages sur la question, tous ne disaient pas la même chose et la vérité sur l’assassinat des Romanov n’avait pas encore vu le jour. J’ai regardé un millions de fois Anastasia (quoi, comment ça, ce n’est pas un récit historique véridique ????). Bref, on ne savait pas vraiment sur quel pied danser, avec tous les mystères que faisait l’union soviétique. Et puis, les archives ont été ouvertes aux historiens. On a pu avoir accès au témoignage d’un des exécuteurs, des fouilles ont été menées sur les lieux et des corps ont été trouvés. En janvier dernier, le mystère était levé. Les Romanov avaient bien tous été fusillés, personne n’en a réchappé et tous les corps ont été finalement retrouvés et enterrés. On a canonisé Nicolas II, après l’avoir élevé au rang de martyr de la révolution… le mystère a pris fin.
Cette histoire continue pourtant de me fasciner et après en avoir parlé avec quelques amies ces derniers temps, j’ai eu envie de relire un ouvrage sur la question. Un ouvrage écrit après toutes les découvertes. La bibliothèque avait le livre de Luc Mary, qui a été publié dans le courant de l’année. Je me suis jetée littéralement dessus avant les congés de Noël et je l’ai dévoré.
Cet ouvrage est assez bien fait. Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas remis le nez dans cette sinistre histoire alors j’avais oublié certains détails et Luc Mary me les a très bien remis en mémoire. Ce livre est parfait pour les néophytes. Il revient bien en arrière et aborde d’une manière claire et didactique tout ce qui a mené à la révolution et à l’assassinat du tsar et de sa famille. Il fait remonter les prémisses de la révolution rouge jusqu’en 1905. Je ne suis pas experte en histoire de la Russie alors je ne le contredirais pas ! Bref, il expose avec clarté le mécontentement de la population, la pauvreté, les erreurs de Nicolas II, qui n’a pas la trempe d’un tsar, il le dit lui-même. Il expose la guerre de 1914. La Russie avait une grande armée, mais une armée pauvre, les coupes dans le budget militaire ayant obligé les soldats à acheter eux-mêmes leur équipement et leurs armes. Il expose comment Nicolas est resté sourd aux demandes du peuple, comment les militaires ont fait usage de la force pour maîtriser les mouvements de foules, tuant des centaines de personnes qui étaient venue demander de l’aide… il explique comment la faim, le froid et la pénurie de tout ont exacerbé les sentiments révolutionnaires, en ville d’abord, puis dans les campagnes. Bref, il retrace tout ce qui a pu mener à ce régicide. J’ai bien aimé relire tout cela car c’est dit d’une manière claire, sans parti pris, sans jugement aucun. Les faits, rien que les faits. Puis, il reconstitue les mois d’emprisonnement de la famille du tsar. Comment ils ont subi les attaques verbales des gardes, comment ils se sont liés d’amitié avec certains, comment ils s’occupaient en coupant du bois et en cousant. Puis, il reconstitue les dernières heures, la fusillade dans le sous-sol de la maison Ipatiev, à Ekaterinbourg, la tentative de cacher les restes, le désir de ne pas dévoiler le massacre tout de suite à la population. La séparation de deux des corps pour brouiller les pistes, le démembrement et l’acide, pour faire disparaître les corps, le vol des bijoux.
Ce qui est dommage, c’est que la conclusion du livre est trop rapide. Je sais que le mystère est maintenant résolu, mais j’aurais aimé que Luc Mary s’attarde un peu plus sur l’enquête en elle-même, sur les rebondissements qu’elle a connu, qu’il développe un peu les théories qui ont été échafaudées, les fausses Anastasia et les faux Alexis qui se sont manifestés au cours des 70 ans qui ont suivi la disparition des Romanov. Même si tout cela s’apparente maintenant à de la mythologie, ça fait partie du mystère. On ne pourra pas effacer de l’esprit des gens le doute, l’envie de croire qu’un ou deux membres se sont échappés, tout cela a tellement participé au mythe que je trouve dommage d’y consacrer que quelques lignes. Mais ce n’était pas le propos du livre. Le but de ce livre était d’expliquer ce qui a conduit le peuple et l’armée à exécuter son tsar et le contrat est plus que rempli. Un petit bonus aurait été apprécié, voilà tout…
Bref, une lecture que j’ai beaucoup aimée et qui m’a fait me replonger dans les mystères qui m’ont fascinée dans ma jeunesse ! Un livre que je recommande tout de même à tous ceux qui s’intéressent à cette histoire !!