Mansfield Park – Jane Austen

Publié le par Pimpi

Je ne sais pas vous, chers lecteurs, mais moi, je trouve qu’on ne parle pas beaucoup de Jane Austen sur les blogs en ce moment... Alors pour pallier cela, subitement, l’envie m’a prise de relire Mansfield Park, pour ne pas dépareiller avec tous les autres blogs… Je dois vous avouer, puisque nous sommes entre nous, que j’avais comme un a priori sur Mansfield Park. Cet a priori avait quelques bonnes raisons d’être. La première étant que le livre était dans ma bibliothèque depuis bien longtemps et qu’il portait des marques certaines de lecture, sauf que je ne me souvenais PAS DU TOUT de l’avoir lu et qu’en dehors de Fanny Price, je ne me souvenais pas non plus des protagonistes. C’est dire s’il m’avait fait une impression durable… D’autre part, je sais que Mansfield Park n’est pas un des livres préférés des Janéites (il y a au moins une personne dans mes connaissances, fan de Jane Austen, qui trouve ce roman parfaitement ennuyeux). En conséquence, chers lecteurs, j’avais fait traîner la (re)lecture de ce roman, m’attendant à moins aimer que les autres. Ah ! C’était sans prendre en compte mon évolution littéraire et personnelle ! Je viens de passer deux semaines à le lire et c’est avec une tristesse sans nom que j’ai refermé la dernière page et quitté cet univers dans lequel je me suis trouvée happée durant ces deux dernières semaines.

 

Bon, ne nous emballons pas, commençons par le commencement. Mansfield Park est le premier roman « mature » de Jane Austen, d’après l’introduction de mon édition. Souvenez-vous, Pride and Prejudice et Sense and Sensibility avait été rédigés dans ses plus jeunes années et corrigés par la suite. Mansfield Park, qui a été rédigé entre 1812 et 1814, fut publié en 1814.

 

Dans mon édition, Mansfield Park fait 400 pages écrites en petits caractères. Le roman tout entier tourne autour d’une jeune fille, Fanny Price. Mais avant de vous raconter son histoire, commençons par un petit portrait de famille, voulez-vous? Ça aidera à mieux comprendre…

 

Il était une fois trois sœurs (dont on ne connaît pas le nom de jeune fille, sachez-le, mais est-ce bien important ?). La première des trois sœurs a épousé Sir Thomas Bertram, dont le titre laisse supposer, à juste titre, une certaine fortune (ou plutôt, une fortune certaine). Cette jeune femme chanceuse devient alors Lady Bertram. De lui, elle aura quatre enfants, Tom, Edmund, Maria et Julia. La petite famille Bertram vit dans la magnifique demeure de Mansfield Park.

La seconde sœur a épousé Mr Norris, l’ecclésiastique de Mansfield Park, qui a ensuite eu la bonne idée de quitter ce bas monde assez rapidement. Mrs Norris a donc emménagé dans une petite maison à proximité de Mansfield Park, où elle commence aussitôt à laisser libre cours à son penchant naturel pour le commandement.

La troisième sœur a épousé un Lieutenant de la Marine sans le sou, sans relation et sans avenir, par amour, mais aussi, il faut bien le dire, pour faire faire un pied de nez à sa famille. Lorsque commence le roman, elle est mère d’une ribambelle d’enfants, dont Fanny et William sont les aînés.

 

Malgré les différents qui ont opposé Mrs Price à ses sœurs, Sir Thomas, sous l’autoritaire influence de Mrs Norris, facilite le placement de William dans la marine et propose d’accueillir chez lui Fanny. La petite fille a alors une dizaine d’années. Il semble qu’à l’époque, il était assez fréquent que des parents riches recueillent chez eux un cousin pauvre, lui offrant ainsi une vie et une éducation à laquelle ledit cousin n’aurait jamais pu prétendre. Cette proposition si charitable fut donc acceptée avec enthousiasme par Mrs Price. Fanny quitte donc la demeure familiale un beau matin, en direction de Mansfield Park. Malgré la pauvreté et les conditions désastreuses dans lesquelles la famille Price vit, Fanny a leur cœur déchiré de quitter son frère adoré et elle lui promet de lui écrire très souvent. Après un long trajet, elle arrive enfin à Mansfield Park. Une demeure magnifique, mais qui lui semble si étrangère au début qu’elle ne peut s’empêcher de pleurer à chaudes larmes, comprenant qu’elle ne retournerait pas chez elle. Elle pleure surtout l’absence de William, toute seule dans la petite chambre qu’on lui a attribuée. C’est alors que se noue la relation avec le seul être sur Terre qu’elle aimera plus que son frère : Edmund Bertram. Dès qu’il la voit si malheureuse, Edmund la prend sous son aile, cherchant à lui faire oublier sa tristesse. Il lui promet papier et plume pour écrire à William, mais aussi de porter lui-même les lettres au courrier. C’est ainsi que dès leur première rencontre, Edmund se pose en mentor de Fanny, en protecteur, un rôle qu’il jouera tout au long du roman. Dès les premiers jours, Fanny voue un véritable culte à Edmund, un sentiment qui va évoluer en amour à mesure que les années vont passer.

 

Dès son arrivée à Mansfield Park, Fanny doit faire face aux différences qui l’opposent à ses cousins, notamment à Tom, Maria et Julia. Ceux-ci ne comprennent absolument pas pourquoi elle manque ainsi  d’éducation et de tenue, et ils ne se privent pas pour lui faire sentir son infériorité à la moindre occasion. De même, sa tante, Mrs Norris, malgré ses bonnes paroles, ne laisse pas passer une journée sans faire clairement comprendre à Fanny qu’elle n’a pas le droit de s’attendre au même traitement que les enfants Bertram. Elle la traite plus en aide de maison qu’en véritable membre de la famille. Mais Edmund est là qui veille au grain et de toute façon, son opinion est la seule qui compte aux yeux de Fanny.

C’est ainsi que notre héroïne vit plus ou moins en marge de la famille Bertram, elle est là sans être là, toujours discrète et effacée, jamais exigeante, ayant une conscience aigue de son infériorité, mais toujours prête et désireuse de rendre service, pleine de gratitude, très douce. Elle devient en quelque sorte la dame de compagnie de Lady Bertram, une femme indolente qui se fatigue au moindre mouvement et qui ne jure que par son petit chien. Les années passent ainsi tranquillement, jusqu’à l’arrivée dans le voisinage de Mr Henry Crawford et de sa sœur Mary, venu tout droit de la « bonne » société de Londres. Leur arrivée va bouleverser la petite vie de Mansfield Park d’une manière dont je ne vous dirai rien pour ne pas vous gâcher le plaisir de la découverte… Sachez qu’il sera question de scandales, d’amour non retourné, d’amour non déclaré, de désillusions et de déconvenues. Cela ne vous paraît-il pas un programme alléchant ??

 

J’ai adoré ce livre. Je l’ai d’autant plus aimé que je ne m’y attendais pas le moins du monde et ce fut un véritable coup de cœur que j’ai vécu avec ce livre. J’ai eu un peu de mal à entrer dedans, mais ce n’était pas la faute du livre, plutôt la faute de tout le reste (trop de travail, trop de stress, aucun moyen de me concentrer sur ma lecture). Après avoir lu 30 pages en trois jours sans avoir rien compris à ce que j’avais lu, j’ai tout simplement renoncé et j’ai attendu la fin de semaine pour me plonger dans le roman. Pendant deux jours complets, je n’ai pas mis le nez dehors en dépit du soleil éclatant qui brillait à l’extérieur. Et pendant deux, j’ai vécu, vraiment vécu, à Mansfield Park, avec Fanny. A tel point que le retour à la réalité a été des plus difficiles le lundi matin !! Mais tout le temps qu’a duré ma lecture, j’ai tout partagé avec Fanny et Edmund, leurs angoisses, leurs doutes, leurs joies et leurs espoirs. Je ne saurais vous dire exactement ce qui m’a plu dans ce roman, ce fut un tout.

 

J’ai aimé le personnage de Fanny. Une jeune femme très discrète, LCA dans l’âme. Mais le trait de caractère qui m’a le plus plu chez elle, c’est la manière dont elle reste constante dans ses opinions et dans son avis. Elle parvient à discerner la personnalité des gens très rapidement et se forger sa propre opinion. Elle a beau être un petit être chétif, de constitution faible, elle a une volonté de fer et ne cède jamais. Ni la peur de décevoir les personnes pour qui elle éprouve une gratitude sans nom, ni la peur de perdre tout ce qui constitue son univers, ni la pression gentiment exercée par Edmund ne parvient à la faire plier et à lui faire accepter ce qu’elle ne peut, en son âme et conscience, accepter. Elle a des principes de vie et n’écoute qu’eux pour prendre ses décisions. Elle le dit d’ailleurs, à Henry Crawford. Elle lui dit que nous avons tous en nous une âme qui est là pour nous guider dans la vie et nous indiquer les choix à faire, nous oublions juste de la consulter la plupart du temps. Ce qui est le plus étonnant, c’est que le roman entier tourne autour d’elle, mais des principaux protagonistes, c’est sûrement la personne qui est la moins décrite, la plus effacée, à l’image de sa personnalité… La brillance des autres efface un peu Fanny, mais au final, c’est elle qui sera la plus heureuse…

 

Bien entendu, il y a un homme dans l’histoire, on le sait, il y a toujours un homme. Edmund, qui depuis son arrivée à Mansfield Park, a forgé son âme et son jugement, l’a entraînée à penser par elle-même, à se fier à son jugement, qui l’a incité à donner son avis en le lui demandant tout le temps. Il est sa force, il est son âme, il est ce qui lui fait tenir dans la vie. Il a toujours été là pour elle et rares sont les moments où il ne l’est pas… Edmund est lui aussi un homme qui a des principes de vie bien définis. Il souhaite entrer dans les ordres et accorde beaucoup d’importance à la bienséance. Un personnage intéressant, clairvoyant la plupart du temps, mais qui a fait preuve d’un aveuglement qui a beaucoup surpris Fanny dans une certaine situation. Fanny qui, persuadée de ne jamais être à la hauteur de l’homme qu’elle admire le plus au monde, est prête à tout endurer pour le savoir heureux et qui se prépare à la pire des nouvelles pour une femme qui aime. Fanny qui lui pardonne tout. Parce qu’il est lui. Edmund est un sexy man qui s’ignore. Donnez-lui un lac et je suis sûre qu’il portera à merveille la chemise mouillée…

 

J’ai l’air de vous présenter ce roman comme un roman romantique (y’a pas comme des répétitions, dans la phrase ?), mais c’est loin d’en être un, à l’image des autres romans de Jane Austen. Mansfield Park est marqué par le quotidien dans ses petits détails, par des descriptions de la vie à Mansfield Park, des petites choses sans importances mais qui confèrent à l’histoire un réalisme saisissant et qui en font un roman passionnant. C’est également une des raisons qui ont fait que j’ai pu y vivre ainsi pendant tout le temps qu’a duré ma lecture et qui ont fait qu’il m’a tellement plu. Il contient sa part d’ironie et de satire, dans les personnages de Mrs Norris et sa tendance à régenter le domaine et y imposer ses volontés, dans le personnage de Lady Bertram, qui semble incapable de faire quoi que ce soit sans l’aide de Fanny, qui n’a d’autre intérêt dans la vie que son chien. La société de plaisir et de divertissement, incarnée par les personnages de Henry et Mary Crawford, n’est pas non plus présentée sous un jour favorable, bien au contraire. Elle est marquée par la superficialité et la recherche du plaisir avant le respect des règles de la bienséance. Et tout cela, sous la plume de Jane Austen, a fait de ce roman un véritable coup de cœur pour moi. Je ne sais pas si je peux classer Mansfield Park dans le classement de tête… car pour reprendre la formule maintenant célèbre d’Isil, qui parle de Jane Austen et de ses romans comme personne, Mansfield Park est mon préféré, à l’exception de tous les autres. Et moi aussi, le dernier roman de Jane Austen que j’ai lu est toujours mon préféré (du moins, c’est une tendance que j’ai remarqué ces derniers mois…).

 

En résumé, donc, chers lecteurs, une vraie lecture coup de cœur !!Vivement le prochain !

Publié dans Autour de Jane Austen

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L
<br /> <br /> Je viens  de relire ton avis dont je me souvenais encore un peu... je viens enfin de recommencer ce livre, pour l'instant j'ai lu 60 p et je suis déjà beaucoup plus confiante que la dernière<br /> fois... reste à trouver du temps pour lire en dehors des journées de boulot !:)<br /> <br /> <br /> <br />
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P
<br /> <br /> Booooooon, génial!! MP est toujours meilleur la seconde fois en fait.... enfin, c'est mon avis!<br /> <br /> <br /> J'espère que tu trouveras le temps de l'apprécier toi aussi alors!!! Hihihihi!!!! :)<br /> <br /> <br /> <br />
C
Moi c'est plutôt Emma que je n'aime guère! Mais bon, mon préféré reste quand même Persuasion que je relis de temps en temps pour me faire du bien!
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P
<br /> Ah, persuasion... un pur bijou!! <br /> <br /> <br />
L
mais justement Pimpi, c'est un vrai plaisir de te lire!!! je suis admirative car je ne pourrais pas!!!! je ne pense pas en être capable!!!! sinon j'ai vu Mansfield Park, Northanger Abbey que j'ai adoré, Pride and Prejudice et Raisons et Sentiments!! Il ne me reste plus qu'à regarder Emma et la fameuse série BBC!!! bisous
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P
<br /> Ah, tu me rassures! J'avais peur d'en dire trop... Si tu aimes lire mes billets longs, j'en suis vraiment ravie !!! Je vais continuer alors ! <br /> Bises à toi aussi !!!<br /> <br /> <br />
A
Eh bien ! ça c'est de l'article ! Je l'ai lu entièrement mais je reviendrai le lire avec plaisir à nouveau quand je l'aurai lu pour le challenge ! ;)
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P
<br /> Merci !!! Tu peux le relire autant de fois que tu voudras !! J'espère vraiment qu'il te plaira !<br /> <br /> <br />
U
PS : ce titre manque à ma culture, mais il n'est pas le seul (I know, shame on me !:s)
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P
<br /> Tu es pardonnée, ça va....<br /> <br /> <br />