Où l’on apprend pourquoi il faut lire les romans roses en anglais

Publié le par Pimpi

Comme le dit si bien Fashion, une enquête se doit d'être exhaustive pour avoir une quelconque valeur. J'ai donc décidé de voir si en VO, Jenna Petterson me donnait les mêmes frissons qu'en français. Pour les besoins de mon étude scientifque, j'ai donc acheté un autre roman d'elle, en anglais, Lessons from a courtesan (qui, pour les non-anglophones, se traduirait de manière très originale par Leçons d'une courtisane - après une recherche intense sur Internet, je me rends compte que ce titre n'a jamais été traduit, c'est donc en grande première pour le lectorat francophone que je vais vous présenter ce roman).

 


Avant de pousser plus loin notre analyse, voyons déjà de quoi il retourne dans ce livre.

Premier chapitre, ouverture. 1812. Une chambre à coucher (ça commence bien).

Victoria est prête à recevoir son époux, l'homme qu'elle a dû épouser dans l'après-midi, mais qu'elle ne connait pas. Pas encore, du moins. Vierge, comme il se doit (Victoria, hein, pas l’homme, les hommes des romans Harlequin ne sont jamais vierges…)

Elle entend des voix, celles de son père et de son tout nouveau mari, ils semblent se disputer. Son mari, Justin Talbot, beau comme un dieu, fougueux, musclé, bref, à tomber par terre, entre dans la chambre, lui annonce tout de go qu'il n'a jamais laissé une femme insatisfaite, et entreprend de la déshabiller. Se passe ce qui doit normalement se passer. C'est une révélation pour Victoria, qui vient de connaître le plaisir ultime (donc, en plus d'être modeste, le bellâtre est réellement habile de ses mains et pas que de ses mains). Justin lui-même semble troublé... il se rhabille et sort de la vie de sa femme aussitôt le mariage consommé (quel rustre).

 

Trois ans plus tard. Justin revient à Londres, dont il a été absent un bon moment. Là, pendant un bal, on lui vante les mérites d'une courtisane arrivée depuis peu mais dont on dit qu'elle connait tous les secrets de l'amour et du plaisir, initiée par un marin qui revenait d'Asie (tout le monde sait que le Kama-Sutra étant une œuvre d'origine asiatique, les peuples du Levant sont forcément doués pour tout ce qui touche aux choses de l’amour...). La belle s'appelle Ria, et elle fait beaucoup jaser (et pas que jaser). Curieux, Justin suit du regard la direction que lui montre son frère et là... s'aperçoit que Ria n'est autre que sa femme (oups)! Ni une, ni deux, son tempérament de feu l'entraîne vers sa femme. Ils s'isolent sur le balcon et là, ça fait des étincelles. Incapables de résister au désir qui les consume littéralement sur place, ils se jettent voracement l'un sur l'autre, à peine le temps de se dire "bonjour, tiens, mais qu'est-ce que tu fais là?"...

 

Durant les 300 pages qui vont suivre, la situation sera à peu près la même. Le désir va consumer Justin et Victoria, puis ils vont assouvir ce désir tout en refusant de se faire confiance. Parce qu'on s'en doute, Victoria, belle et innocente, n'est pas devenue la courtisane la plus désirée de Londres juste pour le plaisir, non, ce serait indigne d'elle... Figurez-vous, chers lecteurs, que Victoria enquête sur la disparition de sa meilleure amie, une vraie courtisane, elle (enfin, une femme désabusée qui a décidé de devenir courtisane), dont elle n'a pas eu de nouvelles depuis des semaines. La jeune femme s'est dit qu'en devenant courtisane à son tour, elle pourrait découvrir ce qui est arrivé à son amie et la sauver si possible! Mais ça, hors de question qu'elle le confie à Justin, elle ne peut plus avoir confiance en lui. Ne l'a-t-il pas abandonnée après leur nuit de noces??? Ah, il peut toujours courir! Il aura son corps, mais pas son âme! Nooooon mais.

De son côté, Justin est troublé. Par des moyens plus ou moins dignes d'un gentleman (genre, qui implique la main et la tête sous les jupons, aucun détail ne nous étant épargné, chers lecteurs), il déterminera que sa femme n'a pas pu connaître d'autre homme depuis son départ, puisque ses réactions sont trop innocentes pour ça. Il en déduit donc (c'est qu'il est AUSSI intelligent, cet homme) qu'elle a autre chose derrière la tête. Il est bien décidé à découvrir ce qu'elle cherche, mais sans lui dévoiler son âme. Il va utiliser son corps pour la faire parler, mais ne lui dévoilera pas son âme et son secret. Na.

Donc nous voilà avec deux jeunes gens aux sens enflammés, incapables de se retenir et tout aussi incapables de se parler. Je ne vous raconterai par quel moyen Victoria découvre ce qu’il est advenu de son amie, ni comment Justin en arrive à hurler haut et fort qu’il aime sa femme (et oui, même les gros durs et les vils séducteurs sont vulnérables), je laisserais le plaisir de la découverte à quiconque souhaite découvrir l’œuvre. Sachez que ça implique beaucoup d’échanges de fluides corporels…

 

Bon, ce n’est pas le tout de disserter sur les mérites des muscles et de la testostérone dans la séduction d’une femme, passons aux faits scientifiques. En me basant sur des faits tangibles tels que le nombre de pages et le rapport histoire/galipette, je me propose de vous dévoiler les différences entre le français et l’anglais.

 

 

Bons baisers de Londres (BBL)

Lessons from a Courtesan (LFC)

Nombre de pages

287

373 (écrites en gros)

Nombre de pages consacrées à l'histoire

274

336

Nombre de pages consacrées aux galipettes

13 (soit 4,5%)

37 (soit 10%)

Nombre de galipettes

2 (plus 3 tentatives interrompues)

5 (plus une tentative interrompue)

 

Au vu de ces chiffres probants, on en déduit que le roman en VO donne plus de détails sur le contenu des galipettes. Effectivement, le roman français consacre 4,5% de son intrigue aux câlins, tandis que le roman en anglais y consacre 10% de son intrigue (et quand il ne se passe pas de vraie action, les héros y pensent tout le temps, ce qui est moins le cas en français). Les chiffres viennent confirmer mon l’impression : j’avais l’impression d’avoir lu une vraie histoire en français tandis qu’en anglais, j’ai plutôt eu l’impression de lire une suite ininterrompue de câlins et de pensées sexuelles. Je confirme par ailleurs que le niveau de détail est plus important en anglais. Dans LFC, le lecteur (enfin, la lectrice) a la chance d’avoir tous les détails des caresses et autres douceurs que les héros se prodiguent mutuellement, ainsi qu’un descriptif détaillé et exhaustif des sensations ressenties. Cela permet de piocher quelques idées, si jamais la lectrice en avait besoin… en français, on suppose que la lectrice a suffisamment d’imagination pour « boucher les trous » si vous me passez l’expression.

 


L’étude des couvertures vient également confirmer les premières constatations : la couverture du roman traduit présente un visage de femme, à demi caché par des plumes, très sage et si ce n’était la couleur du reste de la couverture, on ne se douterait jamais qu’il s’agit là d’un roman de la collection Passion et aventures. Le roman en VO affiche quant à lui un bel homme au profil latino, aux muscles pectoraux saillants, chemise ouverte (pas de poils, les poils, c'est pas glop), très séduisant, passant sa main sur une jambe dénudée, offerte, parfaitement épilée (on l'a vu, les poils, c'est pas glop). On sait donc tout de suite à quoi s’attendre. Par ailleurs, les tons de la couverture sont chauds, rappelant ainsi l’état émotionnel du beau mâle dont il est question dans le roman.

 

Les faits parlent d’eux-mêmes, chers lecteurs : lisez les romans en anglais, c’est plus drôle !

Publié dans Harlequinades 2009

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T
Juste au moment où je me disais qu'il était tant de me détourner des harlequins et de revenir à des lectures plus élevées... je tombe sur ton article et maintenant, c'est fini, tu m'as donné envie d'aller en lire un vo pour constater par moi-même cette différence entre français et anglais. Je me demande si l'anglais se rapproche des harlequins de la collection audace ou si même la collection audace est plus gentille.
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P
<br /> Ah mais oui, il faut absolument que tu essaies un livre en VO, c'est vraiment très drôle et c'est excellent pour parfaire son vocabulaire !!! Tu vois, en plus, c'est didactique, tu n'as vraiment<br /> plus aucune raison de résister!!! Et puis, comme je n'ai pas lu la collection Audace, je ne peux pas comparer...<br /> <br /> <br />
C
Je note mais j'ai peur de passer à) côté des subtilités du texte! Tu me diras, les traductions... Ah, j'hésite, jhésite!! :-)
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P
<br /> Oh ben là, pour les subtilités du texte, tu n'as pos à t'en faire... c'est pas Jane Austen ni Dickens!!!!!!!!!!<br /> <br /> <br />
M
Oh my... quel billet!
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P
<br /> On s'amuse bien avec les harlequinades, n'est-ce pas??? <br /> <br /> <br />
K
My God, c'est du sérieux, ton truc!!!  La proportion pages-galipettes devrait être THE critère pour le Harlequin... sauf que bon, ça lasse à la longue, non??Bien entendu, je suis morte de rire... na!
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P
<br /> Bien sûr que c'est du sérieux... une étude scientifique se doit d'être basée sur des faits concrets et tangibles !!! <br /> Je confirme qu'à la longue, ça lasse... mais c'est très drôle !!!!<br /> <br /> <br />
B
Quelle étude ! Bravo encore pour le temps que tu y as consacré. Pour ce qui est des couvertures, c'est clair que celle de l'oeuvre originale donne tout de suite le ton de ce bouquin. C'est chaud chaud chaud !! Et quel torse !!!
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P
<br /> Oui, hein, quel torse!!! Ma moitié a levé les yeux au ciel en voyant le livre... je lui ai expliqué que c'était pour les besoins de la science et je ne comprends pas, il ne m'a pas totalement<br /> crue!!! <br /> <br /> <br />