Une poignée de gens – Anne Wiazemsky
Un paysan appelé Vania poussait une barque entouré d'enfants. Il est mort d'un arrêt du coeur, là, quelque part dans l'herbe. Les enfants ont grandit en exil, sous d'autres nationalités. Ils sont devenus français, anglais, américain. La plupart ne sont jamais revenus en Russie.
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Depuis que j’avais lu le billet de Rory sur ce roman, je le cherchais. J’ai finalement pu le trouver en bouquinerie il y a peu de temps et comme vous le voyez, il n’a pas fait un long séjour dans ma PAL !
De quoi est-il question dans ce roman ? Ça ne va pas étonner grand monde… de la révolution russe, au moment de l’assassinat de Raspoutine et plus tard du Tsar, au moment où le peuple russe, sous l’égide de Lénine, se rebelle contre l’aristocratie, les propriétaires terriens. C’est la guerre, à cette époque, l’Allemagne est opposée à la Russie. Nous sommes en 1916.
Mais le roman ne commence pas ainsi.
Marie Belgorodsky, femme qui fait peu cas de son passé, est contactée un jour par un homme russe, un certain Vassili Vassiliev, qui lui dit avoir connu sa grand-tante et son grand-oncle, et qui demande à la rencontrer. La jeune femme se rend à contrecœur au rendez-vous, bien décidée à écourter la visite. Mais voilà. Le vieil homme lui tend un journal intime, appelé Livre du Destin, et lui parle de son grand-oncle, Adichka Belgorodsky, prince russe, et de sa femme, Nathalie, sa grand-tante, donc. Et là, sans s’en rendre compte, son passé s’offre à elle. Elle, si prête à oublier ses origines, se découvre curieuse de connaître cette famille dont elle a si peu entendu parler et qui a dû s’enfuir de Russie pour ne pas être massacrée.
Et ainsi, à travers le journal de ce prince russe, à travers des témoignages de policiers et magistrats, on assiste à la montée du communisme de l’intérieur. On comprend la peur et la détresse de ceux qui devaient se battre pour survivre dans cette période de troubles. On se laisse emporter par le portrait de cette époque, qui, bien que romancé, n’en est pas moins réaliste. On souffre avec les personnages de l’impuissance de tous. La machine est lancée, il faut qu’elle aille au bout…
J’ai aimé, chers lecteurs, voire adoré.
Pourtant, au début, j’ai eu du mal à entrer dans ce roman. Je ne lisais que par petits bouts et la construction du roman, en chapitres courts, comme autant de petites scènes extraites du quotidien de cette famille de l’aristocratie russe, parfois sans lien direct les unes avec les autres, si ce n’est de nous faire vivre par petites touches, comme des polaroïds, la révolution russe, cette construction, donc, disais-je, ne me facilitait pas la tâche. Mais plus tard, j’ai pu me plonger dedans pour de vrai, et là, j’ai complètement accroché…
Je disais donc que la narration se fait par chapitres courts, qui nous dévoilent par petites touches la famille Belgorodsky. Mais elle est également entrecoupée d’extraits du journal d’Adichka, et, vers la fin, une fois que le journal a pris fin, complétée par de courts rapports rédigés par des magistrats et des témoins des événements, comme un dossier (une construction que j’aime beaucoup, chers lecteurs, car elle permet de reconstituer soi-même l’histoire à partir de différents témoignages).
C’est un roman touchant et poignant, qu’il faut indéniablement relire pour en saisir toute l’ampleur. Un roman que toute personne qui aime la Russie aimera forcément. Le style est simple, sans fioriture. L’auteur ne cherche pas à faire pleurer dans les chaumières. Mais c’est justement cette sobriété qui le rend si fort… une auteure que je relirai, je pense, et une très très belle découverte !
Une poignée de gens
Anne Wiazemsky
Poche
240 pages
4 /5
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Ce livre a été lu dans le cadre du défi Objectif PAL, 5/126.